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Le long crépuscule du Maroc français au XXe siècle

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Admiratif et nostalgique d’un pays dont il fut Résident Général comme en témoigne la salle marocaine de son château, le Maréchal Lyautey n’a cessé de vanter les mérites du protectorat marocain : « C’est plus souple, moins coûteux, cela réclame moins de personnel, demande moins de temps et assure davantage le respect des coutumes et des traditions ».

« La France va pouvoir porter librement au Maroc la civilisation, la richesse, et la paix. »
(Le Petit Journal, Novembre 1911)

La France a été l’initiatrice de deux périodes de colonisation, la première à l’époque moderne (1453-1792) et la seconde intervenant au XIXe siècle, avec des différences majeures. Après 1870, l’expansion coloniale française, bien que placée sous le signe de la civilisation et du progrès, répond surtout à une quête de légitimité dans une logique géopolitique  après la défaite de Sedan.

La mise en place d’un impérialisme français

Après un certain nombre de pays conquis, la IIIe République se lance dès 1902 à la conquête de l’Empire Chérifien. Ce dernier traverse une crise politique et financière conséquente qui l’oblige à contracter deux emprunts en 1902 et 1904 : il est alors dans une situation de dépendance financière vis-à-vis de la France. De plus, celle-ci administre l’Algérie depuis 1830 et se préoccupe de la sécurité de sa frontière avec le Maroc. Ainsi, en 1902 sont également passés deux accords territoriaux entre le gouvernement français et le Sultan relatifs à cette frontière. Les forces de police et les services de surveillance sont mis en commun, et la métropole est désormais autorisée à faire des incursions de « l’autre côté » afin d’assurer la stabilité de la colonie.

Une guerre des conquêtes ?

Si les précédents pays conquis n’avaient pas suscité de convoitises spécifiques de la part d’autres puissances européennes, le cas est différent pour le Maroc. Trois États s’y intéressent. Tout d’abord, le Royaume-Uni en raison du Détroit de Gibraltar, mais en renonçant à toute visée sur l’Égypte, la France obtient la neutralité britannique.  L’Espagne également intéressée n’entend pas renoncer à ses velléités  : elle occupe la ville de Tanger au nord et le Sahara espagnol au Sud (depuis 1860, suite à la Deuxième guerre du Maroc, ou Guerre de Tétouan).

L’Allemagne constitue le concurrent le plus redoutable. Guillaume II, nouvel Empereur, a des ambitions différentes de celles de ses prédécesseurs : il veut lancer son pays dans une politique mondiale (construction d’une grande flotte et renforcement des positions coloniales, quasi-inexistantes). Se voulant protecteur de l’Islam et inquiet de cette alliance naissante entre la France et le Royaume-Uni, il lance un discours incendiaire à Tanger en 1905 dans lequel il s’engage à ce que l’indépendance du Maroc soit préservée. A la suite de sa déclaration a lieu la conférence d’Algésiras, annonciatrice des systèmes d’alliances de la Première Guerre mondiale. Elle confère à la France et à l’Espagne des droits particuliers en matière de police et de banque tandis que l’Allemagne s’y voit reconnaître un droit de regard.

Toutefois en mars 1911, le sultan, menacé par une révolte, demande à la France de lui prêter main-forte. L’Allemagne s’inquiète alors pour ses prétentions au Maroc et considère cette occupation comme une violation des accords d’Algésiras et décide de réagir. Prétendant protéger les négociants allemands, elle décide le 1er juillet 1911 d’envoyer une canonnière dans la baie d’Agadir. La deux puissances sont au bord du conflit mais préférant éviter un risque de guerre, d’importantes négociations sont entreprises. Guillaume II consent à renoncer au Maroc et la France cède des territoires d’Afrique Équatoriale. En mars 1912 est établi à Fès entre le Sultan et le Président de la République française un protectorat, régime où le souverain est dans une situation de dépendance. Si le territoire est conquis, la pacification est inachevée et il convient donc d’intensifier les opérations de maintien de l’ordre.

L’émergence de mouvements nationaux et la lutte pour l’indépendance

Si la colonisation française a contribué à un meilleure encadrement sanitaire ou à la mise en place de politiques de grands travaux et d’aménagement, des voix discordantes dans le consensus colonial apparaissent peu à peu. Ces mouvements de résistance surviennent dès la mise sous protectorat et deviennent peu à peu des mouvements nationaux et politiques. Ils n’ont pas initialement l’objectif d’apporter l’indépendance mais plutôt d’exiger la citoyenneté française, clause promise aux Africains qui s’engageaient dans la guerre. Le premier véritable parti fondé est le Mouvement national marocain en 1930. Il est relayé en 1934 par le Comité d’action marocaine dont le but était de proposer un programme de réformes à la métropole. Écopant de plusieurs refus de la part du gouvernement français, entre 1934 et 1937, il se radicalise petit à petit.

L’indépendance devient la ligne de mire alors que la Seconde Guerre mondiale n’est pas encore finie : le 11 novembre 1944, le parti Istiqlal condamne le protectorat avec la publication de son manifeste pour l’indépendance. Alors que le parti compte trois mille adhérents en 1944, le nombre s’élève à quinze mille en 1947. Le sultan Sidi Mohammed lui-même, soutien essentiel des indépendantistes, réclame la fin du protectorat dans un discours à Tanger en 1947. Il en appelle à l’ONU. Alors qu’il règne depuis 1927, il est déposé en août 1953 par le Glaoui (tribu guerrière du sud du Maroc) avec la complicité des Français. Son oncle considéré comme plus docile, est placé sur le trône. Il devient alors une figure martyre : les mouvements nationalistes et la population en appellent à son retour. Entre 1953 et 1955, de violentes émeutes voient le jour dans les grandes villes, qui laissent place à une indépendance négociée le 6 novembre 1955.

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